Le domaine de Lindre, situé en Lorraine, est composé d'un ensemble d'étangs, dont un principal occupant près des 3/4 de la surface en eau, et 12 étangs satellites.
La plupart des étangs en France suivent un cycle annuel :
remplissage et alevinage au printemps, production en été, vidange et pêche en automne, puis mise en assec en hiver.
L'originalité des étangs du domaine de Lindre repose sur la pratique d'un assec prolongé, non plus sur une période d'une saison, mais sur deux ou trois années,
pendant lesquelles le fond de l'étang est mis en culture.
L'assec est une pratique ancestrale qui se perd aujourd'hui. Cependant, des études sont menées pour démonter le réel bénéfice que pourrait procurer
une telle pratique, aussi bien d'ordre technique et économique qu'environnemental.
Nous nous attarderons essentiellement sur ce dernier point, et
particulièrement sur les effets que peut avoir l'assec sur le développement faunistique en étang piscicole (poissons, amphibiens, reptiles, insectes
principalement, les oiseaux étant traités dans une autre étude), à partir de données récoltées au domaine de Lindre
qui, aujourd'hui, est le siège d'une riche biodiversité.
Groupe | Nombre d'espèces recensées | Famille/Ordre | Espèces |
---|---|---|---|
Amphibiens | 7 | Ranidé | Grenouille de Lessona, Grenouille rousse, Grenouille verte |
Bufonidé | Crapaud commun | ||
Hylidé | Rainette verte | ||
Salamandridé | Salamandre tâchetée, Triton alpestre, Triton crêté | ||
Reptiles | 3 | Lacertidé | Lézard vivipare |
Anguidé | Orvet | ||
Colubridé | Couleuvre à collier | ||
Insectes | 14 | Odonate | Aeschne bleue, Agrion jouvencelle, Libellule écarlate |
Coléoptère | Carabe doré jardinière, Coccinelle à sept points | ||
Lépidoptères | Machaon, Piéride du chou, Robert le diable, Vulcain | ||
Hémiptère | Gerris lacustre, Nèpe cendréen, Notonecte glauque, Ranatre | ||
Orthoptère | Grande sauterelle verte |
Les Amphibiens
Etymologiquement, ce groupe rassemble les espèces "vivant dans les deux éléments" : sur terre et dans l'eau. Les Amphibiens passent la majeure
partie de leur vie sur terre, mais naissent dans l'eau et y retournent pour s'y reproduire. Ils sont pour la plupart caractérisés par une
phase de métamorphose marquant ce changement de milieu. Ils peuvent être séparés en deux ordres principaux :
- Les Anoures (Grenouilles et Crapauds), possèdant une queue et une forme allongée
- Les Urodèles (Salamandres et Tritons), à corps trapu, ne possèdant une queue qu'aux premiers stades de développement et se déplaçant par bonds
Les Reptiles
Très peu de reptiles ont une existence liée au milieu aquatique. Appréciant les milieux humides, ceux-ci vont vivre sur les berges des eaux stagnantes ou courrantes, et peuvent nager
pour attraper leurs proies.
L'orvet, de la famille des lézards se cache le plus souvent à proximité d'un point humide, favorable à la présence de petits invertébrés dont il se nourrit.
Les Insectes
Les insectes aquatiques se trouvent en majorité en bordure littorale, particulièrement riche en nombreuses plantes aquatiques. Celles-ci abritent aussi des insectes prédateurs qui consomment d'autres invertébrés.
La spécificité des milieux aquatiques est d'accueillir beaucoup de larves d'insectes et d'attirer de nombreuses espèces qui recherchent l'humidité des
berges et vivent sous les pierres, le bois mort. Certaines auront une vie d'adulte hors de l'eau, comme les libellules, d'autres auront une vie
exclusivement aquatique, comme les notonectes.
- Les Odonates : possèdent un développement larvaire aquatique et prédateurs chassant près de l'eau.
- Les Coléoptères : courrants dans les étangs, et colonisant rapidement les milieux. Ce sont en général des nageurs moyens qui avancent
lentement ou qui se déplacent le long des tiges aquatiques.
- Les Lepidoptères : ceux-ci sont attirés par les zones humides en raison de la riche biodiversité florale qui s'y trouve.
- Les Hémiptères : divisés en deux sous ordres, les Homoptères (cigale, puceron...) et les Hétéroptères (punaises).,Les espèces trouvées au Lindre
sont essentiellement des Hétéroptères vivant dans l'eau. La caractéristique des Gerris en liaison à ce mileu est sa capacité à se déplacer en marchant
sur l'eau. En parcourant incessamment cette surface, elles contribuent à mélanger les couches superficielles et le biofilm qui se forme naturellement
L'eau y est ainsi moins stagnantes, mieux oxygénée et thermiquement mélangée. Quant aux Nèpes, celles-ci respirent par l'intermédiaire d'un siphon caudal
en remontant périodiquement à la surface.
Cliquez sur les différentes parties de l'image pour accèder à plus d'information
http://alsace.lpo.fr/docLPO/UNICEM-Roseliere.pdf
La mise en assec de l'étang s'accompagne à l'évidence d'un changement de milieu de vie des espèces qui trouvaient leur habitat dans l'eau ou sur les rivages de l'étang, et pourrait s'apparenter à une destruction des niches écologiques. Ainsi, pour préserver la richesse naturelle de l'étang, voire l'enrichir, des travaux d'entretien et d'aménagements écologiques sont effectués : regénération des roselières, création de mares propices au développement des insectes et Amphibiens, restauration et revégétalisation des berges.
Les roselières : ce sont les zones en bordures des plans d'eau, dans lesquelles poussent les phragmites, communément appelés roseaux. Elles sont
l'abri d'une faune remarquable. En effet, insectes, oiseaux, batraciens, mammifères viennent s'y nourrir, s'y reproduire, y élever leurs jeunes
ou se protéger des prédateurs.
La mise en assec permet la régénération des roselière par le redessinement des berges de manière favorable au développement des phragmites, ainsi
que par le fauchage d'espèces végétales indésirables.
Les mares: il s'agit de petites étendues d'eau, peu profonde. Chaque mare possède un écosystème qui lui est propre. Du fait de leur faible profondeur et de leur température relativement élevée, elles sont des lieux privilégiés pour le développement de la faune, et notamment d'espèces rares, pour leur accouplement, la ponte des oeufs pour les ovipares, et l'aménagement d'habitats.
Pour l'herpétofaune :
Tout d'abord, l'interêt serait créer ou de conserver les mares, en plaçant par exemple des digues en terre ou en vase, de manière à maintenir ces parties
en eau lors de la mise en assec, de manière à permettre aux amphibiens de toujours pouvoir venir s'y reproduire.
Certaines espèces, telles que les Rainettes vertes, ont besoin de mares déjà bien végétalisées. La création de ces dernières peut ainsi se faire de
préférence en bordure de forêt, dans des roselières pré-existantes.
D'autre part, lors de la mise en assec, il faudra surveiller les résurgences d'eau et voir si des amphibiens ne viennent pas s'y reproduire.
Dans ce cas, il sera alors nécessaire de maintenir le niveau d'eau suffisant à la vie de ces espèces dans ces nouvelles zones immergées.
Pour l'entomofaune
La plupart des insectes aiment les eaux stagnantes possèdant de larges roselières. Le maintien ou la création de tels milieux serait donc nécessaire
également lors de la mise en assec pour le maintien de la biodiversité.
De plus, autour des mares, le type de végétation joue un rôle important pour les insectes, et pas seulement pour les phytophages. Une végétation
buissonnante, en contact avec le milieu forestiern favorise la présence des grosses espèces, alors que la végétation herbacée et très touffue est un obstacle
pour celles-ci mais est recherchée par les phytophages. Les deux types de végétation sont donc à prendre en considération.
Les étangs sont des surfaces privilégiées pour le développement de la biodiversité faunistique. La mise en assec est une pratique qui, si elle est bien menée et tient compte des exigences écologiques des différentes espèces, peut conduire à un élargissement du répertoire faunistique. En effet, le maintien en eau de certaines zones moins étendues que l'étang et formant de petites mares constitue un nouveau milieu qui peut non seulement accueillir les espèces déjà présentes lorsque l'étang était en eau, mais également de nouvelles espèces, notamment certaines espèces rares.